Du non definitif au oui de principe

Le Figaro
15 octobre 2004

Du non définitif au oui de principe;
ASSEMBLÉE La discussion a permis de constater que, sur la question
turque, la classe politique est divisée en quatre « familles »

Nicolas BAROTTE, Elsa FREYSSENET

CEUX QUI DISENT NON À LA TURQUIE

– François Bayrou (président de l’UDF) : « L’adhésion de la Turquie,
ce n’est pas un pas vers l’unité de l’Europe, c’est un pas vers sa
dispersion (…). L’Europe unitaire, libre et forte que nous
défendons, une fois constituée, doit bâtir avec les pays de la
Méditerranée une communauté plus large, une communauté d’obligations
et d’entraide réciproques, une communauté euro-méditerranéenne. »

– Dominique Paillé (UMP, Deux-Sèvres) : « Avec la Turquie, l’Europe
se réduirait à une simple zone de libre-échange, loin de l’idéal qui
anime les fédéralistes auxquels j’appartiens. »

– Philippe Pemezec (UMP, Hauts-de-Seine) : « Aurions-nous fait
l’Europe avec une Allemagne qui aurait nié la Shoah ? L’Etat turc
continue de nier le génocide de près de 2 millions d’Arméniens.
Existe-t-il une hiérarchie dans les génocides ? Le général de Gaulle
a rêvé d’une Europe de l’Atlantique à l’Oural, êtes-vous prêts à
vivre le cauchemar d’une Europe de l’Atlantique à l’Euphrate ? »

– Nicolas Dupont-Aignan (UMP, Essonne) : « L’entrée d’un pays non
européen rendrait impossible le fonctionnement apaisé des
institutions déjà affaiblies par l’élargissement », a-t-il déclaré,
souhaitant un référendum « avant le 17 décembre ».

CEUX QUI DISENT OUI À L’OUVERTURE DE NÉGOCIATIONS MAIS NON À UNE
ADHÉSION

– Bernard Accoyer (président du groupe UMP) : « Les négociations avec
la Turquie ne seront nullement automatiques ni jouées d’avance. »

– Manuel Valls (PS, Essonne) : « L’adhésion de la Turquie, sans
harmonisation fiscale et sociale, sans réelle démocratisation des
institutions européennes, dans une Union à 30, ne peut que
représenter une dilution du projet européen et préparer des réflexes
de crainte et d’hostilité. Nous devons dire clairement qu’ouverture
de négociation ne signifie pas adhésion. »

– Edouard Balladur (UMP, président de la commission des affaires
étrangères) : « Je souhaite qu’on envisage pour la Turquie, comme
désormais pour tous les pays candidats, afin de ne froisser aucune
susceptibilité, et de ménager la dignité d’un grand peuple, une
situation de partenaire privilégié. Pour y parvenir, il faudrait que
le Conseil européen du 17 décembre ne ferme aucune voie. » Il a
souhaité qu’un futur référendum sur la Turquie « prévoie clairement
le choix entre deux solutions » : l’adhésion ou le partenariat
privilégié.

CEUX QUI DISENT OUI À L’OUVERTURE DE NÉGOCIATIONS MAIS NE SE
PRONONCENT PAS POUR LA SUITE.

– Jean-Marc Ayrault (président du groupe PS) : « L’ouverture de
négociations avec la Turquie est un droit légitime. Il ne peut y
avoir de traitement de défaveur. Mais aujourd’hui la Turquie
respecte-t-elle les conditions d’adhésion ? Et l’Union est-elle en
mesure de lui assurer une intégration harmonieuse ? A ce stade, la
réponse à ces deux questions est non », a-t-il déclaré, citant trois
préalables à une éventuelle adhésion : « Réussir l’élargissement à 25
», renforcer le « cadre institutionnel » de l’Union et augmenter ses
ressources financières.

CEUX QUI DISENT OUI

– Noël Mamère (Verts, Gironde) : « Nous sommes pour, résolument pour,
l’intégration de la Turquie à l’Union européenne, parce que nous ne
bornons pas notre horizon aux frontières étroites de la politique
française. L’Europe a besoin de la Turquie pour bâtir un modèle de
cohésion multiculturelle et pour apporter une réponse décisive à la
guerre de civilisation. »

– Pierre Lellouche (UMP, Paris) : « Il s’agit de démontrer que le
fleuve de l’islam peut se fondre dans l’océan de la démocratie et des
droits de l’homme. On ne peut pas tout à la fois faire de
l’intégration des musulmans de France et de la laïcité l’une des
premières priorités sociétales de notre pays, accuser
l’Administration Bush d’aggraver en Irak le conflit des civilisations
que cherchent à imposer au monde Ben Laden et ses terroristes et dans
le même temps dire à la Turquie laïque qu’elle n’a pas sa place chez
nous. »