La Croix
19 octobre 2004
La cathédrale arménienne rassemble la communauté. Anniversaire.
Depuis cent ans, la cathédrale arménienne est un lieu central pour la
communauté de Paris.
SENEZE Nicolas
Silencieuse et lumineuse dans les volutes d’encens, la très belle
cathédrale arménienne de Paris, dans le 8e arrondissement, n’est
malheureusement pas ouverte au public. Nos églises ne sont que des
lieux de culte , souligne Kégham Torossian, président du conseil de
laïcs qui gère la paroisse. Dommage : il s’agit sans doute de la plus
belle de la diaspora arménienne. Mais pour les Arméniens de Paris,
l’édifice, qui a fêté au début du mois son centenaire, est bien autre
chose qu’un monument, c’est le lieu central de leur foi.
C’est en 1904 que la cathédrale a été inaugurée. Un btiment financé
par un richissime arménien de Tiflis (l’actuelle Tbilissi, capitale
de la Géorgie), un roi du pétrole séjournant régulièrement à Paris et
regrettant de ne pas y trouver d’église arménienne. Dès le XVe
siècle, il y a eu des Arméniens à Paris, raconte Kégham Torossian.
Mais c’est surtout dans le courant du XIXe siècle, avec les
persécutions turques, que beaucoup d’Arméniens ont commencé à
arriver. Et plus encore après le génocide de 1915. Aujourd’hui, 400
000 à 450 000 Arméniens vivent en France, principalement fidèles de
l’Eglise apostolique arménienne (lire ci-contre). Si 150 000 d’entre
eux vivent en région parisienne, une grande partie est présente dans
le couloir rhodanien (ainsi, 10 % des habitants de Valence sont-ils
d’origine arménienne !). Dans la mesure où nous étions chrétiens,
notre intégration a été facile. D’autant plus que l’Eglise arménienne
a toujours dit à ses fidèles que s’ils n’avaient pas d’église
arménienne près de chez eux, ils pouvaient aller dans une église
catholique ou orthodoxe , souligne Kégham Torossian, lui-même élevé
dans une école catholique. J’ai appris la messe en latin avant de
l’apprendre en arménien , sourit-il.
Mais cette intégration facile est peut-être aussi le point faible de
la communauté. Aujourd’hui, la plupart des Arméniens nés en France ne
pratiquent plus la langue. De même pour la lecture et l’écriture ,
regrette Kégham Torossian, qui craint une dissolution de la
communauté . Résultat : un seul des 40 prêtres arméniens présents en
France y est né ! Toutes les diasporas disparaissent, constate encore
avec lucidité Kégham Torossian. Combien d’Italiens, de Polonais ou
d’Espagnols d’origine parlent encore leur langue ?
NICOLAS SENÔZE
L’Eglise arménienne.
Premier pays officiellement chrétien, en 301, l’Arménie rejette en
505 les conclusions du concile de Chalcédoine (451). Se constitue
alors l’Eglise apostolique arménienne dont le siège est aujourd’hui à
Etchmiadzine.
Aujourd’hui, elle compte cinq millions de fidèles dans le monde. Son
chef est le catholicos Karékine II.
Depuis 1742, il existe également une Eglise arménienne catholique qui
compte 200 000 fidèles dans le monde, dont 30 000 en France. Son
patriarche, Jean-Pierre XVIII Kasparian, siège à Beyrouth.