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Raffarin repose les termes du débat sur la Turquie

Libération
mardi 21 dĂ©cembre 2004 (Reuters – 17:37)

PARIS – Quatre jours après le conseil de Bruxelles qui a donnĂ© Ă 
Ankara une date d’ouverture pour des nĂ©gociations en vue de son
Ă©ventuelle entrĂ©e dans l’Union europĂ©enne, le dĂ©bat organisĂ© mardi
Ă  l’AssemblĂ©e nationale a permis Ă  plusieurs partis de redire leur
scepticisme Ă  l’idĂ©e d’une Turquie europĂ©enne.

Pour entrer dans l’Union, la Turquie devra faire sa “rĂ©volution
europĂ©enne”, leur a rĂ©pondu Jean-Pierre Raffarin, qui a repris les
arguments avancés par le président Jacques Chirac dans ce dossier.

“Oui Ă  l’entrĂ©e de la Turquie Ă  terme, si elle remplit les critères
d’adhĂ©sion Ă  l’Union europĂ©enne”, a dit le chef du gouvernement.
“Pourquoi ? Parce que, si les conditions sont rĂ©unies, ce sera
l’intĂ©rĂŞt de la France et de l’Europe”.

En cas d’Ă©chec des nĂ©gociations, “s’il s’avĂ©rait que la Turquie ne
veut pas ou ne peut pas adhĂ©rer Ă  l’ensemble de ces rĂ©formes, l’Union
lui proposera un lien partenarial en lieu et place de l’adhĂ©sion”,
a ajoutĂ© le Premier ministre Ă  l’adresse particulière de l’UMP,
favorable Ă  un “partenariat privilĂ©giĂ©” avec Ankara.

A Bruxelles, les Vingt-Cinq ont dĂ©cidĂ© qu’en cas d’Ă©chec des
pourparlers, des dispositions seraient prises “pour que le candidat
concerné soit pleinement ancré dans les structures européennes par
le lien le plus fort possible”.

La sĂ©ance spĂ©ciale de questions-rĂ©ponses de mardi Ă  l’AssemblĂ©e a
été décidée à la suite du conseil européen de jeudi et vendredi, qui
a fixĂ© au 3 octobre la date d’ouverture des nĂ©gociations d’adhĂ©sion
avec Ankara.

Le prĂ©sident de l’UDF François Bayrou et les prĂ©sidents des groupes
communiste, UMP et socialiste, Alain Bocquet, Bernard Accoyer et
Jean-Marc Ayrault, se sont exprimés tour à tour pendant une dizaine de
minutes. Jean-Pierre Raffarin leur a ensuite fait une réponse commune.

Le Premier ministre a ensuite fait une déclaration au Sénat.

“Rien ne condamne la Turquie Ă  l’exclusion Ă©ternelle de l’Europe”,
mais “il n’y a pas automaticitĂ© de la nĂ©gociation Ă  l’adhĂ©sion”,
a souligné Jean-Pierre Raffarin.

“La Turquie doit consolider sa dĂ©mocratie, progresser dans le
respect des droits de l’homme et des minoritĂ©s avec notamment les
tragiques questions arménienne et kurde, confirmer le processus de
réconsiliation régionale qui a été engagé avec la Grèce et régler la
question de Chypre”, a-t-il ajoutĂ©, rĂ©sumant les conditions posĂ©es
par le conseil européen.

“DECALAGE ABYSSAL” ENTRE CHIRAC ET SARKOZY

Le socialiste Jean-Marc Ayrault n’a pas manquĂ© pour sa part de
souligner “le dĂ©calage abyssal” entre la position du prĂ©sident Jacques
Chirac, favorable à une Turquie européenne, et celle du président de
l’UMP Nicolas Sarkozy, qui y est opposĂ©.

“Y-a-t-il un pilote dans l’avion ?”, a-t-il lancĂ©.

“C’est le grand concert de la discorde, c’est la polyphonie des
peurs”, a ajoutĂ© Jean-Marc Ayrault, qui a accusĂ© l’UMP et l’UDF de
“faire assaut de simplisme pour expliquer que la Turquie et l’Europe
sont incompatibles”.

Le communiste Alain Bocquet, dont le camp milite pour l’entrĂ©e de la
Turquie dans l’Union, a dĂ©plorĂ© le “oui d’opĂ©rette”, le “oui frileux
prononcĂ© du bout des lèvres” par les Vingt-Cinq, qui ont posĂ© selon
lui des conditions “pour dĂ©courager la candidature” d’Ankara.

L’Ă©lu communiste a par ailleurs accusĂ© le gouvernement de crĂ©er une
confusion entre le référendum sur le projet de Constitution européenne
“que vous prĂ©voyez d’avancer en toute hâte au printemps prochain”
et l’adhĂ©sion de la Turquie qui reprĂ©sente 15 ans de nĂ©gociations
alĂ©atoires entre Etats au sein des institutions”.

“Il s’agit lĂ  d’une manipulation d’opinion qui trouble le dĂ©bat sur
les vĂ©ritables enjeux”, a-t-il estimĂ©.

En réponse aux inquiétudes de François Bayrou, selon qui la France a
“renoncĂ© Ă  son droit de veto” après avoir “renoncĂ© Ă  porter un projet
europĂ©en diffĂ©rent”, Jean-Pierre Raffarin a assurĂ© que la France
n’avait “pas abandonnĂ©” ce droit “qu’elle exercera le moment venu si
le projet turc n’est pas conforme au projet europĂ©en”.

Le Premier ministre a promis aux Ă©lus un dialogue “rĂ©gulier” et
“transparent” sur cette question.

Ce dialogue “durera tout au long des nĂ©gociations qui peuvent
s’Ă©chelonner jusqu’en 2020. J’engage donc mes successeurs !”, a-t-il
dit, rappelant toutefois que ce dossier relevait en premier lieu
du prĂ©sident de la RĂ©publique et que l’entrĂ©e de la Turquie ferait,
le cas Ă©chĂ©ant, l’objet d’un rĂ©fĂ©rendum en France.

“Nous serons toujours disponibles pour un dĂ©bat mais ne comptez
pas sur moi ni sur mon gouvernement pour mettre Ă  mal les principes
de la Ve RĂ©publique (…) qui donnent au chef de l’Etat la mission
essentielle de négocier les traités et qui donne au Parlement et au
peuple la possibilitĂ© de le ratifier.”

“Le peuple souverain aura le dernier mot. Telle est la conception
que j’ai de la Ve RĂ©publique”, a conclu Jean-Pierre Raffarin.

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