SwissInfo, Suisse
31 Juillet 2005
Génocide arménien: Perinçek persiste et signe
Le politicien turc Doðu Perinçek, sous le coup de deux enquêtes
pour avoir nié le génocide arménien, compare la loi suisse à celles
de l’Inquisition.
Dans une interview à un journal alémanique du dimanche, Perinçek
exige la suppression de cette loi. Et répète qu’il n’y a «jamais eu
de génocide».
La loi suisse contre le racisme est comparable à une «loi médiévale
de l’Inquisition». Elle doit être supprimée, clame Doðu Perinçek dans
une interview accordée au SonntagsBlick, édition dominicale du
quotidien de boulevard alémanique.
Doðu Perinçek est le leader du Parti des travailleurs turcs,
minuscule formation d’extrême-gauche nationaliste, qui a obtenu 0,51%
des voix aux dernières élections législatives (novembre 2002), soit
très loin du quorum, fixé à 10%. Le parti n’a donc aucun député à la
Grande Assemblée Nationale de Turquie.
Ce qui n’empêche pas son chef de juger que la loi suisse contre le
racisme «va à l’encontre des droits fondamentaux et de la liberté
d’expression». Selon lui, elle fait perdre à la Suisse l’amitié de la
Turquie et le respect du monde.
«Il n’y a pas eu de génocide» arménien, répète le politicien dans son
interview. Dimanche dernier dans la capitale vaudoise, il avait déjà
parlé de «soi-disant génocide arménien» lors de l’anniversaire du
Traité de Lausanne, à l’origine de la création de la Turquie moderne
en 1923.
«La Suisse est pire que la Turquie»
Doðu Perinçek savait certes que la Suisse avait une norme pénale
contre le racisme mais il affirme ne pas avoir vu ses interventions
comme une provocation. Il se sent juste tenu par le «devoir de
vérité».
Le politicien a comparé la menace d’une condamnation en Suisse avec
ses expériences dans les prisons turques. «La Suisse est pire que la
Turquie», estime-t-il.
Doðu Perinçek fait l’objet de deux enquêtes en Suisse pour violation
de la norme pénale contre le racisme. Une instruction a également été
ouverte pour la même raison contre une autre personnalité turque,
l’historien Yusuf Halaçoðlu. Ankara a vivement dénoncé ces enquêtes.
L’ambassadeur de Suisse à Ankara, Walter Gyger, a été convoqué
mercredi au ministère turc des Affaires étrangères. De son côté, Alev
Kiliç ambassadeur turc à Berne a été reçu jeudi, sur sa demande, par
le chef de la division politique I du Département fédéral (ministère)
des Affaires étrangères (DFAE).
Commission mixte
Dimanche, Alev Kilic s’exprime également dans la presse suisse. Dans
une interview à la NZZ am Sonntag, il met en garde contre une
limitation de la liberté d’opinion.
«Le fait que les autorités suisses ouvrent de telles enquêtes est un
signal grave à l’attention des Turcs qui vivent ou viennent en
Suisse. Cela signifie qu’ils doivent se taire», juge l’ambassadeur.
Jeudi, le DFAE a rappelé dans un communiqué que le gouvernement
suisse avait toujours déploré et condamné «les tragiques déportations
et les massacres» qui ont eu lieu en Arménie à la fin de l’Empire
ottoman.
Berne a également salué la proposition d’Ankara de créer une
commission mixte d’historiens turcs et arméniens pour étudier cette
question. Parmi les institutions fédérales, seule la Chambre basse du
parlement a jusqu’ici reconnu officiellement le génocide arménien.
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress