APPLICATION DE LA NORME ANTI-RACISTE LE CAS DE DOGU PERINCEK MET DES PROBLEMES EN EVIDENCES
Schweizerische Depeschenagentur AG (SDA)
SDA – Service de base francais
21 septembre 2005
Berne (ats) Dogu Perincek ne pourra etre condamne en Suisse pour
negation du genocide armenien que s’il est possible de prouver qu’il
agit pour des motifs racistes, ethniques ou religieux. C’est une
des difficultes que rencontre le juge d’instruction vaudois Jacques
Antenen.
Mardi, après avoir entendu le nationaliste de gauche turc Dogu
Perincek, Jacques Antenen avait declare qu’il renoncait pour
l’instant a une inculpation. Il souhaitait consulter des documents
supplementaires.
Le juge Antenen est en charge des quatre plaintes deposees en
Suisse contre le Turc et doit determiner s’il a enfreint la norme
anti-raciste. Il ne s’agit pas de savoir s’il y eu ou non un genocide
des Armeniens en 1915, avait-il precise. Plus d’un million d’Armeniens
avaient peri a l’epoque.
La norme anti-raciste du code penal (article 261 bis) punit de
l’emprisonnement ou de l’amende “celui qui aura publiquement (…)
abaisse ou discrimine d’une facon qui porte atteinte a la dignite
humaine une personne ou un groupe de personnes en raison de leur race,
de leur appartenance ethnique ou de leur religion ou qui, pour la meme
raison, niera, minimisera grossièrement ou cherchera a justifier un
genocide et d’autres crimes contre l’humanite”.
Negation de l’Holocauste
Le Tribunal federal a pris position plusieurs fois sur ce thème par
rapport a l’Holocauste. En juin 2000, il avait notamment estime que
celui qui nie ou met en doute le massacre des juifs dans les chambres
a gaz doit accepter fondamentalement l’accusation qu’il agit pour
des raisons de discrimination raciale ou d’antisemitisme, justement
parce qu’il atteint les juifs dans leur dignite humaine.
Dans ce cas et comme dans d’autres, l’inculpation etait survenue
a la suite de publications ecrites. Pour le professeur de droit
fribourgeois Marcel Niggli, dans le cas de Dogu Perincek, la negation
du genocide armenien est en soi une enfreinte a la norme anti-raciste
et doit etre punie, avait-il indique mardi soir au telejournal de la
television alemanique.
Mais le president de la Commission federale contre le racisme (CFR)
Georg Kreis met en doute cet avis. Dans un article de la “Neue Zurcher
Zeitung” du 11 août 2005, il ecrit qu’il est indeniable que la negation
blesse les descendants des Armeniens.
Pas d’ideologie anti-armenienne
Il s’agit toutefois de se demander si dans le cas des Armeniens il
existe une ideologie anti-armenienne historique qui – comme dans
le cas de la haine des juifs – se repète dans l’Histoire. M. Kreis
explique qu’il ne met pas sur le meme pied les deux cas par le fait
que la minorite juive a le triste “privilège” d’etre l’objet d’une
diffamation specifiquement raciste.
Dogu Perincek ne nie pas qu’il y ait eu un massacre pendant la
Première Guerre mondiale – mais des deux côtes. Qu’il s’agisse d’un
genocide perpetre par les Turcs est un “mensonge international”,
a-t-il declare a plusieurs reprises.
Sur le plan politique federal, seul le Conseil national a reconnu
officiellement le genocide armenien. Au niveau cantonal, le Grand
Conseil vaudois a fait le pas en 2003. Juridiquement toutefois, la
reconnaissance officielle par la Suisse du genocide n’aurait aucune
portee en raison de la separation des pouvoirs.
Tensions recurrentes
Dogu Perincek est la figure de proue du Parti des travailleurs (IP),
qui a obtenu 160 000 des 31,5 millions de voix aux dernières elections
parlementaires turques. Venu en Suisse fin juillet a l’occasion de la
celebration du 82e anniversaire du Traite de Lausanne, il avait deja
critique a Lausanne et a Glattbrugg (ZH) le “mensonge international”
a propos des evenements de 1915.
La question armenienne provoque des tensions recurrentes entre Berne
et la Turquie. Si Ankara reconnaît la realite des massacres perpetres
par l’Empire ottoman contre la minorite armenienne, elle recuse le
terme de “genocide” et conteste le nombre de morts.
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