COMMEMORATION. LE GENOCIDE ARMENIEN INSCRIT AU COEUR DE LYON
par TOSSERI Benevent
La Croix , France
24 avril 2006
Malgre l’hostilite de la communaute turque et des riverains, le
memorial du genocide doit etre inaugure aujourd’hui. Lyon (Rhône),
de notre correspondant.
Sous une première couche de dissolvant se detachaient encore en
fin de semaine dernière, sur les lames de pierre blanche dressees
place Antonin-Poncet, ces mots traces au feutre: “Il n’y a pas eu de
genocide.” S’il n’en paraîtra rien aujourd’hui, alors que doit etre
inaugure le memorial du genocide armenien, la plaie reste a vif. “La
memoire du genocide a ete effacee, elle est aujourd’hui attaquee,
non pas par des illumines, mais par un Etat, qui a les moyens de faire
peur a ceux qui manquent de courage et de determination”, pointe Hilda
Tchoboian, directrice de la Maison de la culture armenienne de Decines,
commune de l’est lyonnais où fut erige le premier memorial de ce type
en France, en 1972.
Marseille, seconde ville a accueillir ce lundi un memorial, fut victime
de pressions diplomatiques a la fin des annees soixante. Une simple
stèle, posee loin des regards dans l’enceinte de l’eglise armenienne
du Prado, fut alors substituee a un monument. Trente ans après,
alors que la France a reconnu le genocide armenien par la loi du 29
janvier 2001, les pressions exercees par le consulat turc, relayees
par une manifestation marquee par des slogans negationnistes (lire La
Croix du 22 mars), ne seront pas venues a bout du projet lyonnais. Pas
plus que les quatre recours deposes devant le tribunal administratif
par une association de riverains favorables a un emplacement plus
discret. Le voeu de la communaute armenienne, interpeller le plus de
monde possible sur la realite du genocide, aura ete respecte.
C’est donc entre la place Bellecour et les berges du Rhône, dans
un lieu qui invite plus a la reflexion qu’au recueillement, qu’ont
ete dressees trente-six feuilles de pierre hautes de trois mètres,
sur trois rangees, dans un ordre apparemment chaotique suggerant la
multitude des victimes. La disposition de ces pierres correspond
a une mesure de la messe du compositeur armenien Komitas, une
composition silencieuse que ne percevront pas les badauds. “C’est
un element caracteristique de ce qui fait le genocide armenien,
explique l’architecte du monument, Leonardo Basmadyian, Argentin
d’origine armenienne. Ce compositeur a survecu au genocide avec une
incapacite a la sensibilite.”
Des pierres brutes incrustees en haut des stèles, provenant d’Armenie
pour la plupart, rappellent l’entre-deux dans lequel flotte la memoire
du genocide armenien. Deux ont ete rapportees des villes syriennes
de Deir-es-Zor et d’Alep, principaux lieux du supplice du peuple
armenien. Une autre provient de l’île senegalaise deGoree, lieu de
memoire de la traite des Noirs. D’autres, d’Israël ou du Cambodge,
devraient les rejoindre. C’est le sens des plaques commemoratives “a
la memoire des 1 500 000 Armeniens victimes du premier genocide du XXe
siècle” et “de tous les genocides et crimes contre l’humanite”. Elles
ne seront posees que quelques heures avant la ceremonie pour prevenir
toute nouvelle degradation. Pour Mgr Norvan Zakarian, eveque armenien
de Lyon, le memorial est une manière de “consolation, qui permet de
ne pas laisser les victimes seules face au genocide”. Dans l’espoir
qu’il conduise a la “reconciliation”.
BENEVENT TOSSERI
Le cardinal Barbarin soutient les Armeniens
À la veille de l’inauguration du memorial lyonnais, le cardinal
Philippe Barbarin rappelle, dans un communique, que ce genocide
perpetre par les Turcs en 1915 est “reconnu en France par la loi de
2001”. L’archeveque de Lyon fait part de son “amitie fraternelle” et
toute sa “compassion a la communaute armenienne qui continue d’etre
l’objet d’une haine revoltante”. Il demande aussi de proteger la
necropole chretienne de Djoulfa (dans le Nakhitchevan, en Azerbaïdjan),
profanee en decembre dernier.
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From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress