Nouvel Ecrivain turc poursuivi pour ecrits sur question armenienne

Agence France Presse
28 juillet 2006 vendredi 2:01 PM GMT

Un nouvel écrivain turc poursuivi pour des écrits sur la question arménienne

ISTANBUL 28 juil 2006

Un procureur d’Istanbul a requis jusqu’à trois ans de prison contre
la romancière turque Elif Shafak pour avoir "insulté l’identité
nationale" dans un de ses livres, consacré aux massacres d’Arméniens
sous l’empire ottoman, a rapporté vendredi l’agence de presse
Anatolie.

Les propos incriminés sont ceux de personnages Arméniens du roman
"Baba ve Pic" ("Le Père et le Btard"), initialement écrit en anglais
-Mme Shafak poursuit une carrière universitaire aux Etats-Unis- puis
traduit en turc en mars 2006, a précisé Anatolie.

Le roman suit les pérégrinations de quatre générations de femmes
entre les Etats-Unis et la Turquie pour raconter l’histoire d’une
famille arménienne et des descendants d’un de ses enfants, abandonné
en Turquie lors des massacres d’Arméniens de 1915-1917, qui s’est
converti à l’islam et a vécu comme un Turc.

Elif Shafak, 35 ans, est poursuivie au titre de l’article 301 du code
pénal, qui a déjà servi de base à plusieurs autres procès contre des
journalistes et des intellectuels et dont l’Union européenne, avec
laquelle la Turquie a entamé des négociations d’adhésion en octobre,
réclame l’abrogation.

Parmi eux figurent le directeur de la rédaction du quotidien bilingue
turc-arménien Hrant Dink, condamné à six mois de prison avec sursis,
et l’un des écrivains les plus connus de Turquie, Orhan Pamuk, contre
qui les charges ont été abandonnées.

Comme dans ces deux affaires, la procédure contre Mme Shafak a été
engagée sur la base d’une plainte de Kemal Kerinçsiz, un avocat
nationaliste qui s’est acquis une certaine notoriété pour sa "traque"
infatigable des intellectuels questionnant la position officielle sur
les massacres d’Arméniens.

La question des massacres d’Arméniens commis à la fin de l’empire
ottoman est très sensible en Turquie, qui juge inapproprié le terme
-adopté par plusieurs pays dans le monde- de génocide pour les
qualifier.

Les Arméniens estiment que jusqu’à 1,5 million des leurs ont péri
dans un génocide, Ankara affirme que des massacres ont été commis de
part et d’autre.

Une première demande d’enquête contre Mme Shafak avait été rejetée,
mais cette décision a été cassée en appel. La date du procès n’était
pas immédiatement connue.

su-nc/jlb