VISITE EMPREINTE D’EMOTION POUR CHIRAC EN ARMENIE
Agence France Presse
30 septembre 2006 samedi
Le president francais Jacques Chirac a effectue samedi une visite
d’Etat empreinte d’emotion en Armenie, où la question des massacres
d’Armeniens entre 1915-1917 dans l’Empire ottoman, reconnus par la
France comme un "genocide", a ete omnipresente.
M. Chirac a a cette occasion presse la Turquie de proceder a une
reconnaissance similaire avant de pouvoir adherer a l’Union europeenne.
"C’est avec une emotion profonde que je decouvre la terre d’Armenie",
a lance Jacques Chirac, saluant "l’histoire heroïque et tourmentee
de ce peuple d’Armenie issu de la plus haute antiquite".
"Je pense a tous les survivants de cette tragedie qui durent prendre
les chemins d’un douloureux exil", a-t-il ajoute en evoquant, devant
plusieurs milliers d’Armeniens reunis sur la "place de France"
a peine inauguree a Erevan, les tueries de 1915-1917.
Au cours de cette periode, les massacres et deportations d’Armeniens
dans l’Empire ottoman ont fait plus de 1,5 million de morts, selon
les Armeniens, entre 250.000 et 500.000 selon les Turcs qui refutent
la notion de genocide.
M. Chirac a debute la première journee de sa visite d’Etat par un
hommage aux victimes.
Accompagne de son epouse Bernadette, le chef de l’Etat a depose
une gerbe au pied du Tsitsernakaberd, le "Monument au genocide des
Armeniens", en presence du couple presidentiel armenien.
Parmi ses invites de la diaspora armenienne, le numero un mondial
du caviar Armen Petrossian confiait etre "submerge par l’emotion",
le journaliste Daniel Bilalian eclatait en sanglot et le footballeur
Youri Djorkaeff observait, fige, la minute de silence.
La France est devenue en 2001 le premier grand pays europeen a
reconnaître comme "genocide" ces evenements par une loi, alors qu’un
grand nombre de pays ne retiennent pas cette qualification.
En conference de presse, Jacques Chirac a enfonce le clou en jugeant
que la Turquie devait proceder a une reconnaissance similaire avant
de pouvoir adherer a l’Union europeenne. "Tout pays se grandit en
reconnaissant ses drames et ses erreurs", a-t-il juge.
"Quand de surcroît il s’agit de s’integrer dans un ensemble qui
revendique l’appartenance a une meme societe et la croyance en de memes
valeurs, je pense qu’effectivement la Turquie serait bien inspiree
(…) d’en tirer les consequences", a-t-il poursuivi.
Jusqu’a present, les Europeens n’ont pas fait de la reconnaissance
du genocide armenien de 1915 une condition de l’entree d’Ankara a l’UE.
"Nous conduirons avec les Turcs un travail d’explication", a
indique l’entourage du chef de l’Etat, questionne par la presse sur
d’eventuelles vives reactions de la Turquie a ces propos.
Selon son entourage, Jacques Chirac, qui est favorable a l’entree de
la Turquie dans l’UE, juge que tout pays qui y adhère doit partager
ses valeurs, notamment au regard du reexamen de sa propre histoire,
a l’image de ce qu’ont fait l’Allemagne ou la France.
La Turquie a entame en octobre 2005 des negociations en vue d’une
entree dans l’UE dans dix ou quinze ans.
Accueilli par plusieurs milliers de personnes "place de France",
Jacques Chirac a mentionne la dispute autour du Nagorny Karabakh,
une enclave habitee en majorite par des Armeniens et qui a fait
secession de l’Azerbaïdjan après un conflit meurtrier ayant debute
a la fin des annees 1980.
"Je veux croire que le temps de la paix est venu. Je veux le croire
parce que je connais le prix de la guerre", a-t-il declare.
Il s’est ensuite lance dans un long bain de foule, suivi par Charles
Aznavour, veritable star en Armenie, dont les chansons etaient
diffusees a plein volume et qu’il a qualifie de "grand Francais,
grand Armenien et immense artiste".
Charles Aznavour devait lancer samedi soir l’annee de l’Armenie en
France par un concert exceptionnel sur la "place de la Republique",
devant M. Chirac et des milliers d’Armeniens.
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