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Conference De Presse Conjointe Du President De La Republique, Et Du

CONFERENCE DE PRESSE CONJOINTE DU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE, ET DU PRESIDENT DE LA REPUBLIQUE D’ARMENIE

NEWS Press
2 octobre 2006

Palais presidentiel, Erevan – Armenie, samedi 30 septembre 2006

LE PRESIDENT KOTCHARIAN – Je suis ravi et très heureux de saluer
le President de la Republique francaise, ici, en Armenie. C’est la
première visite d’Etat francaise en Armenie. Bien evidemment, dans le
cadre de cette visite, on a decide de continuer le dialogue cordial
entre nos deux Etats.

On a aborde plusieurs questions. Les contacts vont continuer. Les
discussions vont continuer. On n’a pas pu encore discuter de tous
les sujets dans leur pleine dimension durant cette première rencontre.

Mais il y aura un suivi, c’est certain.

J’accorde une très haute appreciation a nos relations bilaterales.

Surtout, je voudrais noter la dimension economique de nos relations
bilaterales, durant ces dernières annees. Il y a plus d’une centaine
d’entreprises qui ont une participation avec des capitaux francais.

Il y a de grandes societes francaises presentes en Armenie. Il y
a un changement vraiment qualitatif dans les relations bilaterales
economiques.

Je voudrais revenir aussi sur les contacts parlementaires actifs entre
nos deux pays. Il y a des visites reciproques. Parallèlement, il y a
une bonne vingtaine de villes francaises et armeniennes jumelees et les
contacts entre ces villes, au niveau local, regional, sont soutenus
par le dialogue parlementaire, très riche. Ces relations viennent
completer nos relations bilaterales, d’une facon plus generale.

Je voudrais souligner egalement la cooperation dans le domaine de
l’enseignement. A cet egard, je voudrais citer l’Universite francaise
en Armenie, un maillon très important qui relie les Francais et les
Armeniens dans le domaine de l’enseignement.

Bien evidemment, je voudrais revenir sur l’annee de l’Armenie
en France. C’est assez impressionnant. Il y aura plus de 500
manifestations avec plus de 120 000 Francais. La, nous sommes très
serieux et nous sommes interesses a presenter l’Armenie, son passe, son
present, sa culture, en France, dans votre pays Monsieur le President.

Avec le President CHIRAC on a parle de la situation actuelle dans
le processus de règlement du conflit du Haut Karabakh. Je tiens a
souligner particulièrement que le President de la Republique francaise,
personnellement, maîtrise tous les details de cette question, au
niveau d’un veritable expert.

Je voudrais revenir aussi a la diaspora, aux Francais d’origine
armenienne. La, j’ai remarque, lors de l’inauguration de la place de
France, beaucoup de visages de France et d’origine armenienne qui
sont venus vers moi pour me dire qu’ils sont venus specialement en
Armenie pour participer a cette serie de manifestations.

Je remercie, bien evidemment, Monsieur le President Jacques CHIRAC
d’avoir accepte l’invitation de se rendre en visite d’Etat en Armenie,
d’etre present ici. C’est un très grand evenement. Je transmets
avec un grand plaisir la parole a mon cher collègue, le President
Jacques CHIRAC.

LE PRESIDENT – Mesdames, Messieurs, vous comprendrez que mes premiers
mots soient pour remercier de son accueil chaleureux le President
KOTCHARIAN, mais nous nous connaissons bien. J’ai pour lui beaucoup
d’estime et d’amitie. Nous nous connaissons depuis longtemps.

Je voudrais souligner l’emotion qui est la mienne d’etre, pour la
première fois, un President de la Republique francaise sur la terre
d’Armenie. Pourtant, pour les Francais, l’Armenie, c’est quelque
chose qui paraît tout proche, et très connu. J’avais l’impression
de connaître l’Armenie avant meme d’y etre. Puis tout d’un coup,
je me suis apercu, qu’en verite, j’arrivais pour la première fois
sur cette terre. Donc, c’etait une emotion particulière.

A ce titre, je voudrais exprimer tous mes remerciements, mes chaleureux
remerciements aux autorites armeniennes, au President, au Maire
d’Erevan, a la population nombreuse qui est venue ce matin pour
l’inauguration de cette superbe place qui deviendra place de France.

J’espère aussi place de la paix, la paix dans le monde. Je voudrais
dire a l’ensemble de vos compatriotes, Monsieur le President, combien
j’ai ete sensible a leur accueil, et touche par leur accueil. Je me
rejouis que la France soit honoree par l’existence, au coeur de la
capitale de l’Armenie, d’une des places les plus grandes d’Erevan.

Ce soir, je me rejouis de retrouver un certain nombre d’habitants de
cette ville et probablement d’ailleurs, y compris de France, comme
le disait tout a l’heure Monsieur KOTCHARIAN, a l’occasion du concert
que va donner Charles AZNAVOUR, dont chacun sait qu’il est a la fois
un grand Francais, un grand Armenien et un immense artiste. Nous
nous rejouissons tous d’entendre celebrer les liens très profonds,
très chaleureux, culturels, mais aussi cordiaux qui existent entre
l’Armenie et la France.

Au-dela de cet aspect emotionnel, nous avons evoque un certain nombre
de sujets. Nous avons evoque les problèmes de la paix dans cette region
qui doit etre inlassablement confortee. Nous avons evoque les problèmes
concernant le reste, au sens très large du terme, de la region, des
pays voisins du Caucase, mais aussi l’Iran, la Turquie et l’eclairage
que peut avoir le President KOTCHARIAN et l’Armenie sur ces problèmes,
tout a fait essentiels, pour la reflexion d’un responsable europeen,
et notamment Francais. Je remercie beaucoup le President KOTCHARIAN
de nous apporter sa reflexion dans ce domaine.

Nous avons evoque, et nous allons encore evoquer tout a l’heure pendant
le dejeuner, les relations entre l’Armenie et l’Union europeenne, et
aussi nos relations bilaterales. Mais celles-ci sont excellentes. Elles
peuvent toujours devenir meilleures, aussi bien sur le plan economique
que culturel. Elles sont très bonnes, comme le rappelait tout a l’heure
le President KOTACHARIAN. Nous aurons l’occasion, lors de ce dejeuner,
de prendre toute la mesure des questions bilaterales et d’exprimer
notre satisfaction sur leur evolution positive.

Voila ce que nous avons fait aujourd’hui. Je remercie encore le
President, les habitants d’Erevan et le maire d’Erevan, mais surtout
tous les Armeniens d’Armenie, ceux de France aussi, mais je leur
parlerai tout a l’heure.

QUESTION – Monsieur le President, l’Assemblee nationale francaise doit
examiner très prochainement une proposition de loi d’origine socialiste
dont l’objet est de penaliser la negation du genocide armenien. Est-ce
que vous approuvez cette initiative ? Est-ce que vous la soutenez ?

LE PRESIDENT – Je voudrais rappeler, une fois de plus, que la France
reconnaît le genocide Armenien. Elle l’a officiellement reconnu de par
la loi. C’est donc notre loi. Cette loi s’impose a tous. En outre,
vous le savez parfaitement, nous sommes un Etat de droit. La loi
francaise condamne toute provocation a la discrimination, a la haine
ou a la violence raciale. Toute discrimination. C’est la loi qui le
veut. Je serai très heureux d’evoquer ces questions avec le President,
dans le cadre de cette visite d’amitie en Armenie qui nous permet
d’evoquer tous les problèmes, sans reserve. Cela montre bien que la
France a pleinement reconnu la tragedie du genocide et que le reste
relève plus, aujourd’hui, de la polemique que de la realite juridique.

QUESTION – Ma question s’adresse aux deux Presidents. La presence
francaise est très active et sensible en Armenie actuellement que
ce soit dans le domaine economique, dans le business, que ce soit a
l’Universite, la magnifique Universite francaise en Armenie. Est-ce
que vous avez parle de la possibilite de rendre plus active, encore
plus active cette participation de la France a l’economie armenienne ?

LE PRESIDENT KOTCHARIAN – J’ai dit que les discussions seront
poursuivies et on reviendra plus en detail sur les questions concernant
cette dimension economique. Nous attendons une participation francaise
active dans le domaine bancaire. On salue, a cette occasion, l’entree
en Armenie du Credit Agricole. Ces activites, nous les apprecions
hautement. J’ai egalement l’intention de demander de promouvoir
l’arrivee des societes d’assurances en Armenie. Parce que ce secteur
est assez faible, pour l’instant, en Armenie. Il y a egalement d’autres
perspectives liees, peut-etre, a la possibilite de creer un centre
medical en Armenie. Et d’autres projets encore. Encore une fois,
on y reviendra.

Je constate une chose. Avec le President francais, durant toutes
nos rencontres, tous les projets d’accords que nous avons eus avec
le President francais ont toujours ete realises, que cela concerne
les reseaux de distribution d’eau ou, encore une fois, le système
bancaire. Tous ces projets sur lesquels nous etions tombes d’accord
avec le President CHIRAC sont devenus immediatement une realite.

C’est la raison pour laquelle je suis très optimiste et je suis sûr
qu’il y a place pour une activite economique basee sur un terrain
d’entente mutuel.

LE PRESIDENT – Il y a aussi une deuxième raison d’etre optimiste.

C’est que la croissance economique, en Armenie, se developpe a un
rythme très fort, fondee sur le developpement economique lui-meme,
mais fondee aussi et c’est essentiel, sur le genie propre du peuple
armenien, de sa jeunesse, de ses travailleurs, de sa formation,
de son experience. Ceux-ci sont des elements qui se traduisent par
une croissance qui s’accelèrent, et si la croissance s’accelère, les
echanges avec le reste du monde, notamment les echanges avec la France,
ne peuvent qu’augmenter. Et il ne faut pas s’etonner si aujourd’hui ils
de developpent de facon importante dans un climat qui est un climat de
confiance. Il faut savoir, qu’aujourd’hui, les investisseurs francais
ont confiance dans l’Armenie. Ce qui les encourage naturellement,
a juste titre, a y investir, dans toute la mesure du possible.

PRESIDENT KOTCHARIAN – M. Pigeon, un ami d’enfance de M. Jacques
CHIRAC a fait des investissements, il y a des annees, en Armenie. Il
s’agissait, je crois, de petites centrales electriques, cela fait
une dizaine d’annees. A ma connaissance, il est en train d’ouvrir
une deuxième centrale. C’est donc une reussite.

LE PRESIDENT – Le President sait tout !

QUESTION – Monsieur le President, l’adhesion de la Turquie a
l’Union Europeenne passe-t-elle imperativement, a vos yeux, par une
reconnaissance du genocide armenien ? Et si je peux me permettre, M.

le President KOTCHARIAN, pouvez-vous nous dire si vous etes inquiet de
la nouvelle tension qui se developpe entre la Russie et la Georgie et
comment cela pèse-t-il sur l’ensemble de la region de Transcaucasie ?

LE PRESIDENT KOTCHARIAN – Nos relations avec la Turquie ne sont
pas formees a l’heure actuelle. Souvent, on me pose la question de
savoir comment on regarde l’eventuelle adhesion de la Turquie a l’Union
europeenne. Nous sommes très interesses d’avoir pour voisins, des Etats
les plus developpes possibles, les plus democratiques possibles, les
plus ouverts possibles. Nous ne voyons pas d’inconvenient a continuer
sur le chemin de cette adhesion. Nous voudrions tout simplement que,
durant ce processus, les questions qui nous concernent trouvent aussi
leur solution et que le système de valeurs, des valeurs telles que la
liberte, l’ouverture des frontières qui sont les valeurs de l’Europe,
en fait, soient egalement les valeurs pour l’Union europeenne, et ne
soient pas seulement considerees a la dernière etape de l’adhesion
de la Turquie, mais durant le processus, et dès le depart.

En ce qui concerne la deuxième question : evidemment, cette tension
entre la Georgie et la Turquie se fait sentir en Armenie. Les routes
nous reliant a la Russie passent, traversent la Georgie, ce qui
influence directement les volumes de notre cooperation economique.

Nous esperons que ce qui s’est passe trouvera très rapidement, grâce
aux negociations, bien evidemment, une solution. J’ai toujours dit
en Russie, aussi bien qu’a mes collègues georgiens, que l’Armenie
est peut-etre le pays le plus interesse a l’amelioration et a la
normalisation des relations entre Georgiens et Russes. Peut-etre
meme un peu plus que les autres parce que tout ceci a une influence
directe sur notre situation economique.

LE PRESIDENT – La question posee, si j’ai bien compris, est " faut-il
que la Turquie reconnaisse le genocide armenien pour entrer dans
l’Union ". C’est la question que vous avez posee.

Honnetement, je le crois. Tout pays se grandit en reconnaissant ses
drames et ses erreurs. Peut-on dire que l’Allemagne, qui a profondement
reconnu la SHOAH, a perdu son credit ? Elle s’est grandie. On pourrait
le dire pour la France, dans d’autres circonstances, et pour beaucoup
d’autres pays. Un pays, une nation, se grandit toujours de reconnaître
les erreurs qu’elle a pu commettre. Alors quand, de surcroît, il
s’agit de s’integrer dans un ensemble qui revendique l’appartenance
a une meme societe, et la croyance en de memes valeurs, je pense,
effectivement, que la Turquie serait bien inspiree, au regard de son
histoire, de sa tradition profonde, et de sa culture, qui est aussi
une culture humaniste, d’en tirer les consequences.

QUESTION – Ma question s’adresse au President francais. M. le President
ces derniers temps, il y a eu des tentatives de règlement du conflit
du Karabakh dans d’autres instances, par exemple l’ONU. Le groupe
de Minsk s’occupe depuis des annees de cette question dont vous
etes, M. le President, un des co-presidents. Comment evaluez-vous
l’efficacite des activites du Groupe de Minsk ?

Pensez-vous qu’une autre instance que le groupe de Minsk puisse
influencer positivement la solution de ce problème ?

LE PRESIDENT – C’est un problème extremement complexe. Vous en
connaissez tous les elements, je ne developperai pas.

Je dirais, premièrement, que les experts du Groupe de Minsk, depuis
des annees, font un bon travail, sur un sujet infiniment complexe.

Mais ils font un bon travail. Leurs dernières propositions, sur
lesquelles je ne fais de commentaires, peuvent etre contestees d’un
cote ou de l’autre, par Erevan ou par Bakou, c’est vrai, mais on ne
peut pas dire que ce soit des propositions legères. Elles emanent
de gens competents et de bonne volonte. Dans ce contexte, vouloir
transferer la responsabilite du Groupe de Minsk a d’autres experts qui,
par definition, connaîtront beaucoup moins bien le problème et depuis
beaucoup moins longtemps, qui n’auront pas la memoire des choses,
honnetement, je crois que c’est une facilite qui n’est pas justifiee
et qui risque de creer plus de difficultes que de satisfaction.

LE PRESIDENT KOTCHARIAN – Je voudrais egalement revenir sur cette
question. Je suis persuade que la solution de tout conflit doit etre
trouve par des negociations de professionnels, entre professionnels,
et non au moyen de votes, dans des forums differents. Chaque vote
signifie des efforts de part et d’autres, uniquement pour avoir la
quantite de voix necessaire. Mais tout ceci ne peut aboutir a une
solution du conflit, simplement a une augmentation du volume de tel
ou tel dossier. Les parties vont essayer de trouver des resolutions
favorables, ou peu favorables, mais ce n’est pas une solution du
problème, mais peut-etre juste le contraire, la continuation des
problèmes. S’il y a des gens qui essayent de diriger le processus de
negociation dans cette direction, alors nous avons de serieux doutes.

Je repèterai donc encore une fois, il faut des negociations avec des
professionnels, avec des diplomates informes. C’est certain.

QUESTION – Ma question s’adresse au President KOTCHARIAN et si
necessaire, pour commentaires de M. le President. M. le President,
dans une lettre officielle, le Premier ministre turc, M. ERDOGAN,
datant d’avril 2005 et approuvee par la grande Assemblee nationale de
Turquie, celui-ci vous avez propose la constitution d’une commission
mixte composee d’historiens et d’experts armeniens, turcs et de pays
tiers, si necessaire francais, pour faire la lumière sur le passe,
au travers d’une recherche active sur les archives et par le dialogue.

Pourriez-vous nous expliquer pourquoi vous n’avez pas donne suite a
cette proposition qui etait une " première " dans l’histoire de la
Republique de Turquie ?

LE PRESIDENT KOTCHARIAN – Je suis vraiment desole que vous ne soyez
pas informe de ma reponse ; c’est une première chose que je voulais
vous dire. Deuxièmement, les chefs de deux Etats voisins, j’en suis
certain, doivent communiquer, non pas par le biais de la presse et
des medias, mais au moyen des representations diplomatiques, qu’ils
doivent avoir dans leurs pays, sur une base reciproque. Il faut qu’il
y ait des consultations, notamment entre les Ministères des Affaires
Etrangères, ou d’autres moyens adaptes. Je suis desole que ce genre
de relations entre les Etats Turc et Armenien n’existent pas. En
repondant au Premier ministre ERDOGAN, j’ai propose de creer une
commission intergouvernementale qui pourrait traiter de toutes ces
questions, y compris la creation d’une commission d’historiens. Cela
a ete ma reponse, dont je n’ai pas encore l’echo.

Merci, M. le President.

LE PRESIDENT – Je vous remercie.

–Boundary_(ID_iom5A1niHAFLYwRLZ/BhzA)- –

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