GENOCIDE : ANKARA NE DECOLèRE PAS CONTRE PARIS
De Notre Envoyee Speciale A Luxembourg Alexandrine Bouilhet
Le Figaro, France
17 octobre 2006
LE COUP de telephone d’apaisement donne par Jacques Chirac au premier
ministre turc, Recep Tayyip Erdogan, après le vote de la loi francaise
sur le genocide armenien, n’a pas suffi a calmer Ankara.
Loin s’en faut. " Le peuple turc est très irrite : l’image de
la France est gravement affectee " , a affirme, hier, le ministre
turc des Affaires etrangères, Abdullah Gul, en marge d’une reunion
europeenne a Luxembourg.
" La decision du Parlement francais, prise pour des raisons de
politique interieure, a eu un impact très negatif sur le prestige
de la France " , a insiste le chef de la diplomatie turque. " Par
ce vote, la France, pays fondateur de l’Union europeenne, a adopte
une attitude contraire aux critères de Copenhague " , a-t-il ajoute,
en faisant allusion aux critères fixes par l’UE aux pays candidats,
notamment en matière de respect des droits de l’Homme et de liberte
d’expression. Assis aux côtes d’Abdullah Gul, le chef de la diplomatie
finlandaise, Erkki Tuomioja, et leur homologue allemand, Franck Walter
Steinmeier, n’ont pas pris la defense de la France. Au contraire. Lors
de la reunion de travail, la presidence finlandaise de l’UE a marque
sa distance avec la politique hexagonale, affirmant que la loi sur le
genocide armenien " ne refletait pas la position de l’Union europeenne
" . La presidence de l’UE s’est joint a la Commission europeenne pour
critiquer le vote de ce texte juge " dangereux et contre productif
" pour l’avenir des relations entre l’UE et la Turquie. Soucieuses
d’eviter un derapage des negociations d’adhesion cet hiver, la
Commission et la presidence finlandaise se sont montrees conciliantes
avec leur homologue turc hier. " Il n’est dans l’interet de personne
que nous aboutissions a un echec " , a souligne la presidence
finlandaise. " Nous avons fete la première annee des negociations
avec la Turquie. Et ce ne sera pas la dernière fois ! " a promis
le commissaire a l’Elargissement, Olli Rehn. " Les relations entre
l’UE et la Turquie evoluent positivement " , a-t-il ajoute, prenant
le contre-pied du pessimisme ambiant. Les negociations avec Ankara
achoppent toujours sur deux points cles : la liberte d’expression,
et la question chypriote. Liberte d’expression Sur le premier point,
la Commission europeenne a demande a Ankara d’amender l’article 301
du Code penal qui restreint la liberte d’expression. Hier, Abdullah
Gul a promis que le gouvernement turc " examinerait des options "
afin de modifier cette loi. " Nous voulons la liberte d’expression de
toutes les idees en Turquie, y compris celles qui ne nous plaisent
pas " , a affirme le ministre turc. " C’est positif ! " a reagi
Olli Rehn qui doit remettre un rapport decisif sur les progrès de
la Turquie le 8 novembre. Sur la question chypriote, Ankara n’a pas
ferme la porte a la proposition de compromis finlandaise. Le defi,
pour la presidence, consiste a amener la Turquie a ouvrir ses ports
et aeroports aux navires chypriotes avant la fin de l’annee. Faute
de quoi, les negociations entre Bruxelles et Ankara pourraient etre
suspendues par les Vingt-Cinq.
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