Agence France Presse
17 janvier 2007 mercredi 10:43 PM GMT
Les socialistes voteront au Sénat la loi sanctionnant la négation du
génocide arménien
Le premier secrétaire du PS, François Hollande, s’est engagé mercredi
soir à Paris devant la communauté arménienne de France à ce que son
groupe vote au Sénat la loi controversée sanctionnant la négation du
génocide arménien de 1915.
"Je suis venu vous dire mes deux engagements", a déclaré François
Hollande à la Mutualité à l’occasion d’un meeting "contre le
négationnisme" organisé par le Conseil de coordination des
organisations arméniennes de France (CCOAF): "si le gouvernement
transmet le texte au Sénat nous le voterons avec plaisir et force en
tant que groupe socialiste", a-t-il dit.
"Si le texte n’est pas transmis d’ici la fin de la législature je
prends l’engagement que le gouvernement issu des élections le
transmettra au Sénat à l’automne 2007", a-t-il ajouté.
Le texte pénalisant la négation du génocide arménien par la Turquie
en 1915, proposé par l’opposition socialiste et prévoyant des peines
allant jusqu’à un an de prison et 45.000 euros d’amende, a été voté
le 12 octobre par l’Assemblée nationale, déclenchant l’ire de la
Turquie. Il doit être soumis au Sénat.
Patrick Devedjian, proche conseiller de Nicolas Sarkozy et lui-même
d’origine arménienne, est venu aussi apporter son soutien à
l’adoption d’une telle loi mais n’a pris aucun engagement quant à
l’inscription du texte dans l’ordre du jour du Sénat d’ici la fin de
la législature.
Se référant à un acte de vandalisme commis à Lyon en 2006 contre un
monument érigé à la mémoire du génocide arménien, Patrick Devedjian
s’est écrié: "nous ne voulons pas que la Turquie puisse encourager la
haine entre Français en suscitant de tels actes. Cette loi est
devenue nécessaire pour préserver la paix civile dans notre pays".
Forte de quelque 400.000 membres, la communauté arménienne de France
a déjà obtenu le 29 janvier 2001 une loi déclarative reconnaissant le
génocide arménien contesté par la Turquie.
François Hollande a déclenché l’enthousiasme du public en déclarant
"qu’il fallait aller au-delà de la reconnaissance du génocide, punir
le négationnisme et ouvrir un dialogue d’amitié avec la Turquie sur
ces bases".
Serge Klarsfeld, président de l’Association des fils et filles de
déportés juifs de France, a lui aussi apporté "le soutien total et
inconditionnel" de son association "aux victimes du premier génocide
du 20è siècle".
Le philosophe Bernard-Henry Lévy a eu des accents lyriques pour
défendre les Arméniens "confrontés à un négationnisme d’Etat". "Que
serait-il advenu des juifs de l’après-guerre, a-t-il dit, s’ils
avaient eu face à eux une Allemagne négationniste?"
Les massacres et déportations d’Arméniens entre 1915 et 1917 dans les
dernières années de l’Empire ottoman, auquel a succédé en 1923 la
République de Turquie, ont fait plus de 1,5 million de morts selon
les Arméniens, 250.000 à 500.000 selon la Turquie qui évoque des
tueries de part et d’autre.
Des historiens français se sont insurgés contre cette nouvelle "loi
mémorielle", après celle notamment sur la colonisation. L’association
"Liberté pour l’Histoire", présidée par René Rémond, a ainsi accusé
l’Assemblée nationale de vouloir "soumettre la recherche et les
enseignants aux vérités officielles qu’elle édicte".