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Robert Kotcharian : " La Turquie Doit Demander Pardon "

ROBERT KOTCHARIAN : " LA TURQUIE DOIT DEMANDER PARDON "
Propos Recueillis Par Pierre Rousselin

Le Figaro, France
19 fevrier 2007

LE FIGARO. – Comment jugez-vous l’attitude de la France sur la
penalisation de la negation du genocide armenien ? Robert KOTCHARIAN.

– Nous sommes reconnaissants a la France d’avoir donne force de loi
a la reconnaissance du genocide armenien.

Je sais qu’il y a des ­tentatives d’aller plus loin. Elles ne sont pas
de notre initiative mais resultent plutôt des efforts de la communaute
armenienne. C’est une affaire politique interne a la France, et
il lui revient de trouver les formules qui lui conviennent. Mais,
bien evidemment, l’Armenie ne peut qu’etre d’accord avec tout ce
qui concerne la reconnaissance du genocide armenien. Les relations
de votre pays avec la Turquie peuvent-elles s’ameliorer après le
meurtre a Istanbul du journaliste armenien Hrant Dink ? Les avis
divergent mais je pense que cet assassinat n’aura pas d’influence,
une fois passe le choc initial. Le problème est beaucoup plus profond
et prend sa source dans l’histoire du peuple turc. Les empires ont
toujours du mal a demander pardon et c’est encore plus vrai lorsqu’il
s’agit d’un empire oriental. Pourquoi l’Armenie refuse-t-elle la
proposition turque de creer un comite mixte d’historiens sur la
question du genocide ? La normalisation des rapports bilateraux
incombe aux gouvernements et non aux historiens.

C’est pourquoi nous sommes prets a etablir avec la Turquie des
relations diplomatiques sans conditions prealables, a creer une
commission intergouvernementale et a discuter de toutes les questions,
y compris les plus ­sensibles. Sur le continent europeen, plusieurs
pays ont des differends historiques ou territoriaux. Ceci ne les
empeche pas d’avoir des frontières ouvertes, des relations normales,
et de discuter parallèlement des problèmes existants. La vraie question
est la suivante : pourquoi les autorites d’Ankara refusent-elles l’idee
de la creation d’une commission intergou­vernementale pour trouver
des solutions a tous les problèmes bilateraux ? Une adhesion de la
Turquie a l’Union europeenne serait-elle bonne pour l’Armenie ? Le
processus de l’adhesion a l’UE suppose de serieuses reformes pour la
transformation de la societe turque. Cela signifie une progression vers
une Turquie plus previsible, plus ouverte, plus tolerante vis-a-vis
des minorites, plus disposee a reevaluer son histoire, etc. En outre,
avec une adhesion de la Turquie, nous aurions une frontière avec l’UE,
ce qui serait evidemment positif. Mais nous ne voulons pas d’une
adhesion a l’Union " a credit ". N’oublions pas que les negociations
ont ete entamees avec un pays bloquant ses frontières avec son voisin,
sans parler du problème non resolu des relations avec Chypre. Quelle
solution esperez-vous pour le Haut-Karabakh, territoire azerbaïdjanais
peuple d’Armeniens, dont vous exigez l’independance ?

Tout peuple a un droit absolu a son independance. Il n’y a pas
d’exemple d’un peuple qui ait dû renoncer a son independance après
l’avoir acquise dans les faits. Il est absurde de parler de l’integrite
territoriale de l’Azerbaïdjan, car le Haut-Karabakh a acquis son
independance lors de l’effondrement de l’URSS dans un processus
juridique irreprochable et n’a jamais fait partie de l’Azerbaïdjan
independant. Les negociations ne peuvent viser qu’a fixer un delai
pour la reconnaissance de l’independance du Haut-Karabakh au moyen
d’un referendum. Votre visite a Paris coïncide avec l’Annee de
l’Armenie en France. Êtes vous satisfait des relations bilaterales
? L’organisation de l’Annee de l’Armenie en France temoigne des
relations exceptionnelles entre nos deux pays. Je voudrais souligner
le soutien de la France dans l’approfondissement de la cooperation
avec les structures europeennes, la mediation active et le rôle
constructif de la France dans le processus du règlement du conflit
du Haut-Karabakh. Nos relations economiques sont par ailleurs en
progression. De grandes compagnies francaises sont presentes dans
les branches diverses de notre economie. Nous attachons enfin une
importance majeure a la cooperation dans les domaines culturel,
de recherche et d’enseignement. L’Universite Francaise d’Erevan
est ainsi devenue une des ecoles d’enseignement superieur les plus
prestigieuses du pays.

–Boundary_(ID_PXLExyCca/qgLH6dGG1XgA)–

Khondkarian Raffi:
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