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Pelechian, Un Cineaste Hors Normes

PELECHIAN, UN CINEASTE HORS NORMES

Le Monde, France
25 juillet 2007 mercredi

En treize films, le realisateur armenien a bâti une legende. Mais
son oeuvre documentaire reste meconnue

L a sortie en salles de trois films d’Artavazd Pelechian – fût-ce
dans une seule salle parisienne en plein ete – constitue un evenement
non negligeable. Cela pour deux raisons : son oeuvre fait figure
d’eblouissante comète dans l’histoire du cinema, et l’homme, dont les
apparitions se font de plus en plus rares, est nimbe de mystère. Ne
en 1938 a Leninakan, en Armenie sovietique, Pelechian s’est forme au
debut des annees 1960 au VGIK, la celèbre ecole de cinema sovietique,
et est l’auteur de treize films, depuis son film d’etudes intitule
La Patrouille de montagne (1964) jusqu’a Vie (1993).

Cette oeuvre, qui demeure largement meconnue du grand public, peut
etre consideree comme documentaire, mais fait imploser en realite,
par son lyrisme poetique, le cadre couramment admis du genre. C’est
un cinema sans acteurs, ni dialogues ni histoires, qui prend a
bras-le-corps la matière filmee, l’ingère et la regurgite dans une
succession de salves vibratiles, tantôt suaves, tantôt explosives,
mais toujours impregnees de la plus vive sensibilite, de la plus folle
inspiration. En verite, il serait plus juste de designer Pelechian,
après David W. Griffith, Serguei Eisenstein et Dziga Vertov, comme l’un
des plus grands monteurs de l’histoire du cinema, et assurement le
plus hallucine de tous. S’il fallait faire appel a l’image reperable
d’une semblable deraison artistique, celle d’Antonin Artaud ferait
l’affaire. Les trois echantillons que cette programmation nous invite
a decouvrir en constituent de très bons exemples.

Nous (1969) mele ainsi des prises de vues tournees par le cineaste
a des images d’archives pour fabriquer une realite subjective qui
condense et incarne de la manière la plus expressive l’histoire du
peuple armenien. Les Saisons (1972) poursuit ce projet, en focalisant
le point de vue sur la vie saisonnière des bergers armeniens, sur
le rapport sensuel des hommes a la terre et a l’animal : les images
de ce film sont composees de telle sorte qu’elles s’inscrivent de
manière inalterable dans la conscience sensible du spectateur. Notre
siècle (1982) est enfin une evocation quasi surrealiste, a partir
d’images d’archives tant americaines que sovietiques, de la conquete de
l’espace par l’homme. De comptes a rebours a repetition en explosions
recurrentes de carlingues, de corps en apesanteur en atterrissages
approximatifs, ce film allie une reflexion angoissante sur la demesure
technologique et un regard franchement cocasse sur l’incommensurable
vanite de l’homme.

AMBITION PROMETHEENNE

La science du rythme, l’entrelacs reinvente de la bande-son et de la
bande-image, l’art du montage a distance, qui separe plus qu’il ne
relie, evoquent l’ambition de ce cineaste hors normes de proposer,
comme en repartant de zero a mi-chemin du muet et du sonore, une
vision du cinema tel qu’il aurait pu exister.

Cette ambition prometheenne, l’homme Pelechian en accuse comme
il convient la dimension utopique. Reclus quelque part a l’Est,
n’ayant plus rien realise depuis 1993, opposant une certaine force
de resistance a l’exploitation de ses films existants, le cineaste
est devenu de son vivant une sorte de mythe cinephilique. Quelques
sorties fulgurantes le rappellent, de plus en plus rarement, au bon
souvenir des spectateurs les plus attentifs, qui ne l’ont decouvert
en Occident que dans les annees 1980. La première, et l’une des très
rares retrospectives de son oeuvre en France, eut lieu ainsi en 1992,
a la Galerie nationale du Jeu de paume. Un memorable dialogue entre
Artavazd Pelechian et Jean-Luc Godard s’ensuivit dans les colonnes
de ce journal (Le Monde du 2 avril 1992). En depit d’initiatives
ponctuelles depuis lors, le silence a fini par recouvrir cette oeuvre
remarquable. Ces trois petits cailloux permettent aujourd’hui a ceux
qui le souhaitent de remonter la piste Pelechian.

Jacques Mandelbaum

Artavazd Pelechian, le poète cineaste armenienTrois films d’Artavazd
PelechianEspace Saint-Michel,7, place Saint-Michel, Paris-5e. Metro
Saint-Michel. Tel. : 01-44-07-20-49.La revue universitaire
en ligne Cadrage consacre un dossier a Artavazd Pelechian :

–Boundary_(ID_BpuZt 8E4BH9x7t3lE9CLAg)–

From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress

www.artavazd-pelechian.net
Emil Lazarian: “I should like to see any power of the world destroy this race, this small tribe of unimportant people, whose wars have all been fought and lost, whose structures have crumbled, literature is unread, music is unheard, and prayers are no more answered. Go ahead, destroy Armenia . See if you can do it. Send them into the desert without bread or water. Burn their homes and churches. Then see if they will not laugh, sing and pray again. For when two of them meet anywhere in the world, see if they will not create a New Armenia.” - WS
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