Le Monde, France
24 mai 2008 samedi
Atom Egoyan perdu dans son labyrinthe
Le nouveau film du Canadien, en compétition
Le scénario d’Adoration tient un peu du jeu de société : à partir d’un
seul terme, il faut accumuler le plus de définitions possible.
Adoration pour Atom Egoyan, c’est aussi bien le culte que porte le
jeune Simon à la mémoire de sa mère morte que les figures de bois
découpé, représentant l’adoration des mages à la crèche, placées
devant la maison à chaque Noël par l’oncle qui a élevé Simon (Scott
Speedman). Il y a la foi musulmane d’une femme voilée qui fait
irruption dans la vie de Simon et son oncle. Il y a l’enthousiasme que
suscite sur Internet une fiction que l’adolescent a écrite, et qu’il
fait passer pour la réalité.
On retrouve dans ce film en compétition à Cannes, tourné assez
simplement à Toronto et dans sa région, la profusion de réflexions, de
questionnements et de jeux de l’esprit qui faisaient la force et les
faiblesses d’Ararat, le film par lequel Atom Egoyan a voulu faire le
tour de la question de l’identité arménienne en 2002.
Adoration souffre des mêmes défauts, sans être nourri de l’énergie
historique qui propulsait Ararat. Ici, l’artifice finit par dévorer
toute la fiction, réduisant les personnages aux éléments d’un rébus.
Les premières minutes font illusion. Mais très vite, les retournements
de situations, les révélations sur la double identité des personnages
tombent à plat. Malgré quelques moments spirituels (essentiellement
dus au personnage de professeur qu’incarne Arsinée Khanjian, la
compagne du cinéaste), toutes les intrigues d’Adoration se résolvent
de la façon la plus plate qui soit, à la manière des feuilletons
familiaux de la télévision nord-américaine.
Thomas Sotinel
Adorationd’Atom Egoyan Film canadien.Avec Rachel Blanchard, Arsinée
Khanjian, Scott Speedman. (1 h 40).