Visite historique du president turc en Armenie venu chercher…

L’Express, France
6 Septembre 2008

Visite historique du président turc en Arménie venu chercher l’apaisement

AFP

Le président turc Abdullah Gül et son homologue arménien Serge
Sarkissian ont affiché samedi leur "volonté politique" d’apaiser les
relations après des années d’acrimonie entre les deux pays, à
l’occasion de la première visite d’un chef d’Etat turc en Arménie.

Le président Gül a déclaré samedi à son retour d’Arménie que sa visite
historique dans ce pays avait été productif et lui avait donné de
l’espoir pour l’avenir des deux pays voisins à la longue histoire
pleine d’acrimonie.

"Je pense que ma visite a été fructueuse et porteuse d’espoir pour
l’avenir", a déclaré lors d’une conférence de presse le président turc
à son retour d’Erevan où il a rencontré son homologue arménien, Serge
Sarkissian.

"Je suis heureux de voir que nous sommes d’accord avec la partie
arménienne sur la nécessité d’un dialogue pour faire tomber les
obstacles afin d’améliorer les relations bilatérales", a-t-il ajouté.

M. Gül a quitté Erevan peu avant minuit (19H00 GMT) après une visite
de quelques heures émaillée de manifestations de nationalistes
exigeant une reconnaissance du "génocide arménien" qui remonte à
l’empire ottoman au début du XXe siècle.

"Nous avons la volonté politique de résoudre les différends entre la
Turquie et l’Arménie. J’espère que cette visite pourra créer la
possibilité d’améliorer nos relations", a affirmé M. Gül à Erevan,
repris ensuite quasiment dans les mêmes termes par M. Sarkissian.

"Nous avons échangé sur la façon de favoriser la stabilité et la
coopération dans le Caucase", a-t-il ajouté lors d’une conférence de
presse commune avec son homologue arménien.

Le Caucase, une région riche en hydrocarbures et l’un des enjeux
majeurs de la course mondiale aux ressources énergétiques, est en
proie à de graves tensions notamment après l’entrée des troupes russes
en Géorgie début août.

Ce conflit a donné lieu samedi à une nouvelle passe d’armes entre
Moscou et Washington qui s’accusent mutuellement d’alimenter les
tensions dans la région pour leurs propres intérêts stratégiques et
économiques.

Cette crise a poussé Ankara à revoir sa politique dans le Caucase,
favorisant le réchauffement des relations turco-arméniennes, avait
déclaré vendredi soir le ministre turc des Affaires étrangères, Ali
Babacan.

"Quand on regarde une carte du Caucase, on voit l’Arménie", avait-il
reconnu.

Signe d’un réchauffement diplomatique entre Ankara et Erevan,
M. Sarkissian a annoncé que M. Gül l’avait invité en Turquie à
l’occasion du match retour Turquie-Arménie de qualification pour le
mondial 2010 de football.

Agrandir l’image M. Sarkissian avait invité son homologue à
l’occasion du match aller auquel les deux dirigeants ont assisté
ensemble samedi soir, remporté 2 à 0 par les Turcs.

M. Gül est le premier président turc à se rendre en Arménie depuis
l’indépendance en 1991 de cette ex-république soviétique, avec
laquelle Ankara n’entretient pas de relations diplomatiques en raison
de divergences sur le caractère des massacres d’Arméniens commis entre
1915 et 1917 en Anatolie.

Des mesures de sécurité renforcées ont été mises en place dans la
capitale arménienne à l’occasion de cette visite qui a été accompagnée
toute la journée par des centaines de manifestants, à l’appel du parti
nationaliste Dachnak Tsoutioun.

"Reconnaissance", "arrêtez de nier le génocide", scandaient notamment
les manifestants qui ont hué M. Gül à son arrivée à la présidence et
ont formé une chaîne humaine aux abords de l’aéroport. Il ont aussi
organisé une marche aux flambeaux devant le mémorial dédié au
"génocide arménien".

Les sifflets et les huées ont également retenti dans le stade dès
l’arrivée de M. Gül qui s’est installé derrière les vitres blindées de
la tribune présidentielle.

La presse arménienne restait prudente sur l’issue de cette visite, les
experts voyant un premier pas qui ne devait toutefois pas déboucher
sur un rétablissement des relations diplomatiques dans un avenir
proche.

L’Arménie estime que les massacres commis sous l’empire ottoman ont
fait jusqu’à 1,5 million de morts et constituent un génocide, une
position adoptée par plusieurs pays, dont la France, mais
catégoriquement rejetée par la Turquie.

La Turquie a fermé sa frontière avec l’Arménie en 1993 pour soutenir
l’Azerbaïdjan turcophone dans son conflit avec l’Arménie sur la région
du Nagorny-Karabakh, enclave peuplée d’Arméniens en territoire
azerbaïdjanais, dont la sécession a conduit à une guerre entre les
deux pays.

nfojour/afp.asp?id=16509

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