Débat Sur le Génocide à la Chambre des Lords (29 mars)
ROYAUME UNI
samedi3 avril 2010, par Jean Eckian/armenews
La ministre d’État, du Foreign et Commonwealth Office, (baronne
Kinnock de Holyhead) :
Pour commencer, je réaffirme que le gouvernement regrette profondément
la mort de centaines de milliers d’Arméniens qui étaient soit tués par
les troupes ottomanes, soit morts de privations ou de maladie au début
du siècle précédent. Nous partageons l’opinion exprimée aujourd’hui
que les victimes de ces souffrances ne doivent pas être oubliées. Le
sort des Arméniens, et d’autres minorités chrétiennes plus petites,
comprenant les Assyriens, vivant dans l’Empire Ottoman à cette époque,
a été condamné vigoureusement et sans ambages par le gouvernement
britannique.
Je confirme que la position du gouvernement est de continuer à
travailler pour le rapprochement et la réconciliation entre la Turquie
et l’Arménie. En octobre 2009, deux protocoles ont été signés par les
ministres des affaires étrangères des deux pays, d’accord sur un cadre
pour la normalisation des relations et l’ouverture des frontières.
C’est un pas décisif vers de meilleures relations entre les deux pays.
La signature des protocoles – un certain nombre de Lords y ont fait
allusion – n’était pas un pas facile pour les deux pays, et leur
ratification reste une étape sensible. Le gouvernement du Royaume-Uni
ne fera aucune déclaration qui pourrait nuire au processus.
Il paraît y avoir une forte volonté politique, et bien sûr un soutien
populaire, pour améliorer les relations. Le président arménien et le
président turc ont insisté sur ce processus et s’y sont engagés, qui
prévoit également la création d’un sous-comité pour examiner les
questions historiques, y compris les événements de 1915-1917.
Je répondrai à présent à quelques unes des questions que les nobles
lords ont posées. Je dis à la noble baronne, Mme Cox, que bien que
Geoffrey Robertson ait conclu que la convention des Nations Unies de
1948 ne peut pas être appliquée rétrospectivement, il dit que le terme
"génocide" devrait être appliqué aux massacres d’Arméniens. "Génocide"
est un terme précis et son emploi est le mieux apprécié par un
tribunal compétent. Cependant, ni à l’époque ni à présent, un tribunal
n’a eu l’autorité de faire une telle appréciation. Il est par
conséquent inapproprié, pour le gouvernement britannique, d’appliquer
le terme à des événements sur lesquels aucun jugement ne peut être
fait.
J’étais au courant l’an passé que des nobles lords avaient soulevé la
question d’un mémorial. Envoyer un représentant du gouvernement
pourrait suggérer une reconnaissance, et malgré toute notre sympathie
pour la tragédie, nous n’entendons pas envoyer de représentant. Le
gouvernement rejette toute idée selon laquelle le Parlement a été
trompé mais je veux qu’il soit parfaitement clair que les ministres,
et non les fonctionnaires, sont responsables des déclarations qu’ils
font devant le Parlement.
La noble baronne, Mme Cox, a fait référence aux récentes résolutions
et décisions au Congrès des USA et au Riksdag suédois. Celles-ci n’ont
pas changé l’opinion du gouvernement du Royaume-Uni selon laquelle il
revient aux peuples turcs et arméniens d’aborder la question ensemble.
Ni les USA ni le gouvernement suédois n’ont changé leur position à la
suite de ces votes.
Le noble lord, lord Avebury, a fait référence au Livre Bleu, auquel il
est lié depuis longtemps. Comme il l’a relevé, il contient beaucoup de
témoignages indiscutables sur les événements en question. Il devrait
être considéré avec d’autres documents d’archives dans le monde,
relatifs aux événements de 1915-16. Notre ambassade à Ankara peut
certainement se rendre utile en transmettant une lettre des
parlementaires du Royaume Uni à leurs homologues turcs, les invitant
au dialogue au sujet de la validité du Livre Bleu. Je comprends que
des fonctionnaires ont déjà pris contact avec le noble lord pour
avancer dans ce sens.
Notre opinion, à propos de ces événements, c’est que le dialogue entre
Turcs et Arméniens est le plus nécessaire. Cependant, sur la question
des parlementaires, au sein desquels le noble lord, lord Avebury est
extrêmement impliqué, tout ce que nous pouvons faire est encourager
les parlementaires turcs à s’engager sur cette question. Je crains
qu’à ce jour, leur réponse à l’idée d’une conférence ait été quelque
peu négative, mais bien sûr, tout progrès dans ce domaine sera
bienvenu et devrait s’interpréter comme allant vers cette
réconciliation que nous voulons tous.
Le noble lord, lord Hylton, et d’autres nobles lords, ont soulevé la
question des déportations. Le premier ministre Erdogan et le ministre
des affaires étrangères ont à présent clarifié : il n’y a dans
l’immédiat aucun plan pour déporter de Turquie les immigrés arméniens
illégaux. Le président Gul a lui aussi affirmé clairement que la
Turquie ne fait aucune discrimination à l’encontre les Arméniens
vivant en Turquie.
Les commentaires d’hommes politiques turcs qui ont suivi, ont souligné
la tolérance montrée par la Turquie à l’égard de ses immigrés. Je
répète qu’il revient au gouvernement turc de gérer les questions
d’immigration et d’immigration clandestine conformément aux
conventions internationales et aux lois turques.
Sur l’adhésion à l’Europe, que plusieurs lords ont mentionnée, la
question que nous discutons aujourd’hui n’est pas un préalable à
l’adhésion de la Turquie à l’Union Européenne. Cependant, suivant les
critères politiques d’adhésion, on espère de la Turquie qu’elle
maintienne des relations de "bon voisinage" avec les pays de la
région, qui incluent bien sûr l’Arménie.
La question du Karabagh a été soulevée par le noble lord, lord
Maginnis et d’autres. Les présidents d’Arménie et d’Azerbaïdjan ont eu
des réunions utiles et constructives dans le cadre du groupe de Minsk,
y compris très récemment à la fin janvier. Nous espérons que ce
processus se continuera. Sur la question de nos contacts, mon
honorable ami Chris Bryant, Ministre pour l’Europe, a discuté des
relations Turquie-Arménie avec son homologue turc lors de la récente
visite du premier ministre turc, et il a fait pression sur son
homologue en janvier et février de cette année pour encourager la
normalisation des relations avec l’Arménie.
La noble baronne, Mme Rawlings, a soulevé un certain nombre de points.
Il se peut que je n’y réponde pas complètement, mais s’il y a quelque
chose qui manque dans ma réponse, elle peut compter sur une réponse
écrite aussitôt que possible. Politiquement, le gouvernement du
Royaume-Uni continue de faire pression à la fois sur le gouvernement
arménien et sur le gouvernement turc pour avancer dans le processus de
normalisation et pour trouver des moyens de régler leurs différends.
Le Secrétaire des Affaires &étrangères a soulevé la question qu’avec
le président arménien, nous avons eu de nombreuses discussions, avec
les ministres des affaires étrangères et d’autres ministres et, dans
ces pays, nos ambassadeurs s’engagent dans ces questions.