4 MAI : DE LA COLERE A LA DéTERMINATION
Ara
armenews.com
lundi 9 mai 2011
La communauté arménienne est en colère. Ainsi, la loi pénalisant
la négation du génocide des Arméniens a été massivement rejetée
par le parti au pouvoir mercredi 4 mai. Un vote qui ne surprendra que
les incorrigibles optimistes. Pourquoi en effet le gouvernement UMP
qui a bloqué cette loi pendant presque 5 ans au Sénat allait-il
du jour au lendemain changer d’avis sur ce même sujetâ~@~I ? Ca
aurait été prêter de bien grandes vertus au parti socialiste que
de penser que la seule magie de leur initiative du 4 mai eÔt suffi a
faire modifier la doctrine gouvernementale en la matière. De même,
croire que l’anti-turquisme affiché de l’Elysée induit automatique
une arménophilie procède d’une identique naïveté. En réalité,
la posture des autorités sur cette question découle essentiellement
de leur islamophobie. Et ce sentiment, ancré traditionnellement dans
l’idéologie de droite peut d’autant plus se traduire aujourd’hui
dans certaines orientations politiques, qu’il correspond au ressenti
d’une partie de l’opinion. D’où ce niet tonitruant a l’entrée de la
Turquie en Europe. On comprendra cependant qu’un tel positionnement
ne saurait constituer pour autant un formidable gage d’intérêt pour
la défense des droits de l’homme. On serait même tenté de penser
exactement le contraire.
Le pouvoir n’a obéi dans l’affaire du 4 mai qu’a des considérations
de Realpolitik. Si sa posture de fermeté apparente a l’égard de la
Turquie le gratifie d’une certaine popularité, elle est supposée
néanmoins avoir un coÔt pour les entreprises qui travaillent
avec ce pays. C’est du moins l’idée que tente de vendre Ankara, qui
voudrait faire croire que la France a plus besoin de la Turquie que le
contraire. Et le moyen le plus simple de compenser ce coÔt est sans
doute de sacrifier “un peu” les droits des Arméniens. Une manière
de se racheter a bon compte une conduite auprès des dirigeants turcs
qui considèrent la “lutte contre les allégations de génocide”
comme un fondement de leur Etat.
Certes, une telle attitude ne comporte pas que des avantages. Et
elle risque notamment de se traduire par l’alimentation d’un foyer
de mécontentement dans la communauté arménienne. Mais le pouvoir
dispose a travers ses élus, dans les Bouches-du-Rhône ou même en
région parisienne, de relais suffisamment puissants et aguerris pour
calmer le jeu. Quelques beaux discours par ci, quelques subventions
par la, et on passera vite a autre chose. Sans compter que le fond du
débat politique pour les échéances électorales a venir, a supposer
qu’il y ait un “vote arménien”, a toutes les chances de s’articuler
autour d’enjeux qui auront tôt fait de balayer les reproches actuels.
Les Francais d’origine arménienne se voient donc renvoyés a leurs
propres limites. En France, le négationnisme pourra continuer
a s’exprimer sans retenue. Les quelques chiens qui aboieront
n’empêcheront pas la caravane du Sarkosysme de passer en 2012.
Faudrait-il pour autant baisser les bras ? Considérer comme une
fatalité qu’on ne puisse en France parler de quotas dans le football
(heureusement), mais qu’il soit possible de nier sans entrave le
génocide des Arméniensâ~@~I ? Il reste un an au gouvernement pour
nous prouver le contraire et a la communauté arménienne pour passer
de la colère a une véritable efficacité politique. Si l’échec
est le fondement de la réussite, l’expérience du 4 mai ne doit
pas être considérée autrement que comme un marqueur qui devrait
permettre d’ajuster le tir pour les échéances a venir. En premier
lieu, en ce qui concerne les engagements annoncés par le Garde des
Sceaux (circulaire antinégationniste au parquet, coopération avec
la communauté arménienne pour combattre le négationnisme). Et ce,
indépendamment du combat pour cette loi qui, en tout état de cause,
doit continuer.
From: A. Papazian