L‘objectif de ce « Saint Jacques de Compostelle » oriental est de ne pas oublier les Arméniens, Syriaques et Chaldéens déportés puis massacrés dans les déserts syriens et mésopotamiens. Ce fut, notamment le cas, le long du lac de Van et dans les hauts plateaux de la province de Mouch. Durant ce cheminement spirituel, militant et introspectif, chacun pouvait se joindre à sa cause ou suivre son avancée sur Internet. « Une aventure individuelle à l’origine devenue collective » à laquelle s’est notamment joint Jacques Avakian, compagnon de route et co-réalisateur de l’exposition.
Pour Pascal Maguesyan, le réveil de la société civile turque face à un gouvernement progressiste a été l’un des facteurs essentiels de la réalisation de cette marche. « Jusqu’à l’été 2015 tout semblait possible.» Une société en ébullition dont le journaliste immortalise la mobilisation et les visages au cours des 900 kilomètres qui le séparent de son objectif. D’ailleurs, il y consacre une des trois parties de son exposition.
Les deux autres parties de cette dernière font état de ce qu’il appelle « les charniers de pierre ». Il s’agit des 2 500 églises et des 500 monastères qui ont été détruits en Arménie Occidentale. A travers ses photographies, Pascal Maguesyan témoigne d’un patrimoine arménien à l’état de ruines, souillé et pillé. Seules l’église Sainte-Croix d’Aghtamar et la cathédrale Sourp Guirados ont pu être restaurées.
L’attentat de Suruç, le 20 juillet 2015 et la militarisation de la région ont contraint Pascal Maguesyan à interrompre cette marche. Il n’a donc pas pu fêter la revivification de la région le 16 août 2015 à Sourp Guiragos. Pourtant, des milliers de personnes étaient attendues à l’occasion des fêtes de l’Ascension.
« Entre le nécessaire et le possible, il y a le rêve », lui confiera un ami. « Il est raisonnable de rêver », lui dira un autre de ses proches. Cette expérience est un moyen de partager avec la communauté arménienne les vestiges d’une tragédie passée.
Celle-ci reste toujours tiraillée entre sa reconnaissance par une partie de la Turquie qui demande pardon d’une part et le négationnisme inspiré par l’État turc et certains milieux politiques et intellectuels de l’autre. Pour Pascal Maguesyan, c’est aussi un moyen de faire échos à l’ensemble des peuples qui souffrent dans les sociétés orientales.