NEWS Press
27 septembre 2006
Amnesty International – Turquie : Un journaliste pris une nouvelle
fois pour cible
Amnesty International est consternée par l’annonce, le mardi 26
septembre, du nouveau procès intenté au journaliste Hrant Dink,
accusé du « délit d’insulte à l’identité turque » au titre de
l’article 301 du Code
pénal turc.
L’organisation considère que ces poursuites s’inscrivent dans le
cadre d’une politique de harcèlement visant un journaliste ayant
exercé son droit à la liberté d’expression – un droit que la Turquie,
en tant qu’État partie à la Convention européenne de sauvegarde des
droits de l’homme et des libertés fondamentales et au Pacte
international relatif aux droits civils et politiques, a l’obligation
légale de respecter.
L’annonce de ce nouveau procès intervient après la publication de
propos tenus par Hrant Dink à l’agence de presse Reuters. Le
journaliste aurait déclaré, parlant des massacres d’Arméniens sous
l’empire ottoman, «
Bien sûr, je dis que c’est un génocide, parce que le résultat
identifie ce que c’est et lui donne un nom. Vous pouvez voir qu’un
peuple qui a vécu sur ces terres pendant quatre mille ans a disparu.
» Amnesty International s’inquiète particulièrement de ce nouveau
procès, le troisième intenté à Hrant Dink au titre de l’article 301,
parce qu’il semble s’inscrire dans le cadre d’une politique de
harcèlement d’un auteur ayant exprimé de façon pacifique une opinion
discordante. De surcroît, Hrant Dink avait déjà été condamné à une
peine de six mois d’emprisonnement avec sursis en octobre 2005 pour «
délit d’insulte à l’identité turque » (condamnation confirmée en
appel en juillet 2006) et s’il était déclaré coupable du même délit
il serait emprisonné. Si tel était le cas, Amnesty International le
considérerait comme un prisonnier d’opinion.
Amnesty International considère ces poursuites particulièrement
décevantes après l’acquittement, accueilli avec soulagement il y a
quatre jours, d’un autre écrivain, la romancière Elif Safak, inculpée
au titre de l’article 301 pour des propos tenus par les personnages
fictifs de son roman, Le Btard d’Istanbul. L’organisation avait vu
dans cet acquittement un pas positif pour la liberté d’expression en
Turquie ; elle craint cependant qu’il n’ait constitué une exception
plutôt que la règle en la matière et qu’ait été démontrée une
nouvelle fois l’incapacité de certains magistrats turcs à appliquer
en droit national les règles du droit international, comme le prévoit
l’article 90 de la Constitution turque. L’organisation renouvelle son
appel en faveur de l’abrogation de l’article 301 dans son
intégralité, pour mettre fin à l’application arbitraire de cette loi
mal définie.
Enfin, Amnesty International note qu’à l’origine de ce procès il y
aurait eu une plainte déposée par des éléments de la société civile
opposés à l’abolition de l’article 301 ; des plaintes similaires,
visant à ce que des poursuites soient engagées, auraient été déposées
par le passé à plusieurs reprises, accompagnées de provocations et
manifestations parfois violentes lors des procès, créant une
atmosphère de menace dans la salle d’audience. L’organisation appelle
les autorités turques à s’assurer que toutes les mesures nécessaires
soient prises pour assurer la protection des accusés, de leurs
avocats et de leurs sympathisants dans de telles affaires et, bien
sûr, le bon déroulement de la justice. Pour plus d’informations
concernant les préoccupations d’Amnesty International à propos de
l’article 301, voir Turkey : Article 301 : How the law on «
denigrating Turkishness » is an insult to free expression.
From: Emil Lazarian | Ararat NewsPress