LE GENOCIDE N’EST PAS LE FACTEUR DETERMINANT DE NOTRE IDENTITE
Publie le : 04-03-2015
Info Collectif VAN – – Le Collectif VAN vous invite
a lire cette interview publiee sur le site Repair le 3 mars 2015.
Repair
Le mardi 3 mars 2015
Interview avec Gerard Libaridian, Historien americain, conseiller
principal du premier President armenien Levon Ter-Petrossian, dans
les annees 90.
Dans cette interview, realisee par Ara Tadevosyan et publiee sur le
site Mediamax le 13 janvier 2015, Gerard Libaridian explique pourquoi
avril 2015 sera forcement decevant et repète que le plus important
est de ne pas oublier le genocide tout en essayant de ne pas etre
dependant de cette question. Il rappelle egalement que les structures
armeniennes existaient avant le genocide armenien et insiste sur le
fait qu’il ne faut pas sacrifier la nouvelle generation en Armenie
sur l’autel de la reconnaissance.
La traduction de cette interview en francais a ete effectuee par
REPAIR Plateforme Armeno-Turque.
Ara Tadevosyan : M. Libaridian, que va t-il arriver le 25 Avril ?
Pensez-vous que nous avons des attentes exagerees quant au centenaire
du genocide armenien ?
Gerard Libaridian : Je crains que nous nous reveillerons un peu decus
du 25 Avril. L’etat et des organisations parlent de programmes et
d’evenements a grande echelle dont les subtilites ne sont pas encore
claires. Je suis enclin a penser qu’ils vont faire ce qu’ils ont
fait au cours des annees passees, a une plus grande echelle. Ce qui,
toutefois ne conduira pas a un changement qualitatif.
Il y a aussi cette impression que nous faisons tout ca pour
les etrangers en premier lieu, et agissons par ignorance envers la
question elle-meme. En realite, beaucoup de choses restent devant nous
en ce qui concerne le genocide armenien, mais nous nous concentrons
psychologiquement sur la reconnaissance internationale. Il n’y aura
de changement qualitatif que lorsque nous ferons des changements
institutionnels au sujet de la question du genocide et oublierons la
reconnaissance internationale pendant un certain temps.
Personnellement, je ne me soucie guère plus de savoir si Obama ou
Merkel reconnaîtront le genocide armenien ou non. Je trouve insultant
que, ayant souffert des massacres et du genocide, nous devrions
supplier pour la reconnaissance.
Être subordonne a la reconnaissance internationale signifie etre
l’otage de ce qu’ils disent et ce qu’ils ne font pas, et ainsi relier
notre avenir et notre independance psychologique et intellectuelle
aux autres.
Pensez-vous que je serais heureux si Obama prononce le mot > ou que je passerais une autre annee malheureuse s’il ne le faisait
pas ? Ce qui importe c’est de ne pas oublier le genocide, mais en meme
temps, de ne pas etre dependant de lui : agir comme des personnes
ayant une pensee independante et en valorisant le developpement du
potentiel intellectuel.
Je n’attache pas d’importance aux points de vue que d’autres detiennent
sur cette question primordiale de mon histoire et de ma nation. Ils ne
sont pas ceux qui decident de l’histoire de mon peuple et ma maturite
politique ne repose pas sur eux.
Nous devrions penser aux oublis qu’il peut y avoir dans les etudes sur
le genocide et a ce que nous ne savons pas. Combien d’experts sur le
genocide qui connaissent des langues etrangères — y compris le Turc
ottoman — existe t-il en Armenie et en diaspora ? Nous avons besoin
d’experts qui donneront une reponse non seulement a la question de
comment le genocide a ete commis, mais aussi qui expliqueront les
raisons pour lesquelles il a ete commis et ce qui l’a rendu possible.
Dans le cours de l’histoire, il y avait et il y a des regimes qui
tentent d’exterminer les gens sous leur contrôle afin de regler un
certain problème racial ou religieux. Neanmoins, ils n’ont pas les
moyens ou les conditions pour commettre une telle chose. Pourquoi
l’Empire ottoman a lui reussi cela au cours des dernières annees de
sa vie ?
Il existe des jeunes engages dans des etudes sur le genocide, mais leur
nombre est faible et la majorite d’entre eux ont un niveau insuffisant
pour se presenter correctement sur la scène internationale. Il
convient de noter que la science solide et invariable facilitera la
reconnaissance internationale. C’est ce qui est arrive a la generation
precedente : d’abord au niveau amateur, la question du genocide s’est
retrouvee dans les mains des historiens et des scientifiques. C’etait
la première generation, alors que maintenant nous devons preparer
les deuxièmes et troisièmes generations. Mais cela n’est pas fait
selon moi.
Nous avons egalement besoin d’une institution scientifique de niveau
international qui sera exclusivement engagee dans des etudes sur
le genocide. Malheureusement, nous ne l’avons pas. Il y a bien le
Musee-Institut du genocide armenien a Erevan, mais ses ressources
financières sont limitees et il dispose d’un petit nombre de
chercheurs. Il est essentiel de recruter les scientifiques de la
diaspora qui ont avance dans ce domaine plus que les scientifiques
bases en l’Armenie.
Je crois que nous nous devons, pour les victimes du genocide,
d’utiliser le centenaire afin de faire un pas en avant en termes
qualitatifs.
Il y a deux points de vue opposes en Armenie et en diaspora. Certaines
personnes croient que nous vivons accroches a la